samedi 26 avril 2014

Faire l'amour - Jean-Philippe Toussaint - ****



Quatrième:

C'est l'histoire d'une rupture amoureuse, une nuit, à Tokyo. C'est la nuit où nous avons fait l'amour ensemble pour la dernière fois. Mais combien de fois avons-nous fait l'amour ensemble pour la dernière fois ? Je ne sais pas, souvent.


Faire l'amour est le premier volet de l'ensemble romanesque Marie Madeleine Marguerite de Montalte, qui retrace quatre saisons de la vie de Marie, créatrice de haute couture et compagne du narrateur : Faire l'amour, hiver (2002) ; Fuir, été (2005, prix Médicis) ; La Vérité sur Marie, printemps-été (2009, prix Décembre) ; Nue, automne-hiver (2013).



Le début du roman:

J’avais fait remplir un flacon d’acide chlorhydrique, et je le gardais sur moi en permanence, avec l’idée de le jeter un jour à la gueule de quelqu’un. Il me suffirait d’ouvrir le flacon, un flacon de verre coloré qui avait contenu auparavant de l’eau oxygénée, de viser les yeux et de m’enfuir. Je me sentais curieusement apaisé depuis que je m’étais procuré ce flacon de liquide ambré et corrosif, qui pimentait mes heures et acérait mes pensées. Mais Marie se demandait, avec une inquiétude peut-être justifiée, si ce n’était pas dans mes yeux à moi, dans mon propre regard, que cet acide finirait. Ou dans sa gueule à elle, dans son visage en pleurs depuis tant de semaines. Non, je ne crois pas, lui disais-je avec un gentil sourire de dénégation. Non, je ne crois pas, Marie, et, de la main, sans la quitter des yeux, je caressais doucement le galbe du flacon dans la poche de ma veste.

samedi 19 avril 2014

Les lois fondamentales de la stupidité humaine - Carlo M. Cipolla - *****

Faites vous partie de la catégorie des Intelligents, des Bandits, des Crétins ou des Stupides ?
Petit livre assez jubilatoire où l'auteur s'amuse à parodier un essai de sciences humaines.

Quatrième:
Comment évaluer l'impact de la stupidité humaine sur nos destins personnels et sur l'ensemble de la société ? Vaste question à laquelle l'historien Carlo Maria Cipolla décida en 1976 de répondre par un bref essai au ton éminemment scientifique.Au ton et seulement au ton : car derrière la rhétorique académique se cache un texte désopilant, qui ressortit au genre « pseudo-scientifique », comme en son temps le célèbre Cantatrix Sopranica de Georges Perec, ou aujourd'hui les très sérieuses recherches de Jean-Baptiste Botul.Diffusé en 1976 aux États-Unis sous la forme d'une édition limitée et numérotée, Les lois fondamentales de la stupidité humaine a été publié en italien en 1988 (dans un recueil générique intitulé Allegro ma non troppo), et pour la première fois dans sa langue originale, l'anglais, à l'automne 2011.

Extrait

« VIII. Quatrième loi fondamentale

Les crétins, ceux qui occupent la zone C dans notre système, ignorent en général à quel point les gens stupides sont dangereux. Rien d’étonnant à cela : ce n’est qu’un signe de plus de leur crétinerie. Ce qui est vraiment surprenant, c’est que les êtres intelligents et les bandits ne sont guère plus capables de reconnaître la puissance destructrice propre à la stupidité. Il est extrêmement difficile d’expliquer pourquoi il en est ainsi, et l’on peut seulement observer que, face à des gens stupides, des hommes intelligents et des bandits commettent souvent l’erreur de se laisser aller à l’autosatisfaction dédaigneuse au lieu de faire des provisions d’adrénaline et de bâtir leurs défenses.
On pourrait croire que l’homme stupide ne nuit qu’à lui-même, mais ce serait confondre stupidité et crétinerie. Nous sommes parfois tentés de nous associer avec un être stupide afin qu’il serve nos objectifs. Les conséquences sont toujours désastreuses parce que a) ce calcul repose sur un malentendu complet quant à la nature essentielle de la stupidité et b) il offre à l’individu stupide une marge de manœuvre encore plus vaste pour l’exercice de ses talents. On espère toujours manipuler l’être stupide, et d’ailleurs on y parvient, jusqu’à un certain point. Mais, en raison du côté erratique de leur comportement, on ne peut prévoir toutes les actions et réactions des gens stupides et on se retrouve très vite pulvérisé par les décisions imprévisibles de l’associé stupide.
C’est ce que résume clairement la Quatrième Loi fondamentale, stipulant que
« Les non-stupides sous-estiment toujours la puissance destructrice des stupides. En particulier, les non-stupides oublient sans cesse qu’en tous temps, en tous lieux et dans toutes les circonstances, traiter et/ou s’associer avec des gens stupides se révèle immanquablement être une erreur coûteuse ».
Depuis des siècles, depuis des millénaires, dans la vie publique comme dans la vie privée, d’innombrables individus ont omis de prendre en considération la Quatrième Loi fondamentale, ce qui s’est traduit par des pertes inimaginables pour l’humanité. »

Carlo M. Cipolla - Les lois fondamentales de la stupidité humaine



vendredi 4 avril 2014

Logicocomix - Doxiadis & autres - *****

Excellente BD sur la vie de Bertrand Russel et à travers elle sur la recherche des fondements des mathématiques.
Cette BD a ceci de particulier qu'elle mets aussi en scène les créateurs de la BD et nous fait part de leurs interrogations quant à la construction du récit.
On y croisera entre autres : Wittgenstein, Whitehead, Frege, Gödel, Poincaré...
Très enrichissant pour quelqu'un qui, comme moi, n'y connaissait pas grand chose en histoire de mathématiques.