lundi 5 janvier 2015

L'exil intérieur - Roland Jaccard - ****

Présentation:

Il y a près d’un siècle, Nietzsche comparait l’humanité de demain à une plage de sable ; tous les humains, disait-il, seront très égaux, très ronds, très conciliants, très ennuyeux. La prophétie nietzschéenne s’est réalisée. Ultime figure de l’histoire, le petit-bourgeois s’étend planétairement. Sur-contrôlé de l’extérieur, auto-contrôlé de l’intérieur, décorporalisé, désexualisé, hyper-normalisé, l’homme de la modernité, quoi qu’il en ait, sera de plus en plus l’image même de l’homme administré coulant une existence paisible dans des sociétés d’abondance totalitaires – sans jamais prendre conscience que si ses besoins y sont satisfaits, c’est au détriment de sa vie même. Dans cet essai au ton vif et personnel, Roland Jaccard a tenté de tracer le portrait psychologique de l’homme de la modernité. Et de préciser le rôle que jouent les employés de la santé mentale (psychologues, psychothérapeutes, psychiatres…) dans la vaste entreprise de normalisation des conduites indispensable au bon fonctionnement de nos modernes médiocraties anonymes.

Miettes :

L’homme de la modernité est effectivement un homme faible, désarmé, comme châtré. Isolé, également. Il est l’homme de la technologie froide et des affects morcelés ; l’homme de l’exil intérieur. Schizoïde hors des murs de l’hôpital psychiatrique ; schizophrène à l’intérieur de ces murs.

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Ce sera, c’est déjà, l’ère des grandes termitières où chacun sur l’échiquier réglé jouera avec la dernière énergie qui lui reste [...] son rôle de réactionnaire, centriste, révolutionnaire ordonné ou gauchiste désordonné dans un monde sans alternative où tout sera devenu critiquable et où la prolifération des utopies assurera de manière commode et anodine le bon fonctionnement des institutions existantes.

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L’homme de la modernité se vit à travers ses troubles ; s’il les revendique comme son bien le plus précieux, sa production la plus personnelle, la plus authentique (la normalité est une valeur en baisse), il en rejette simultanément la responsabilité sur les autres : la famille, l’école, le travail, la société. Il les assume mal. Les défaillances sexuelles, les insomnies angoissées, le sentiment d’être étranger, bizarre, ailleurs ou simplement inférieur le conduisent chez le psychothérapeute, dernier recours individuel (il y a bien sûr les recours collectifs : politiser sa névrose) de sa détresse subie, jouée ou inventée.

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Remarque:
Ouvrage plus psychanalytique. Des réflexions sur l'homme de la modernité toujours d'actualité. 

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